dimanche 26 septembre 2010

Nosferatu

Selon Bram Stocker, le Nosferatu est une créature non-morte et non-vivante, jadis humaine, qui doit se nourrir du sang des vivants pour acquérir une force vitale. Certes, l’écrivain irlandais a créé la quintessence d’un mythe provenant autant des histoires des Grecs anciens que des folklores balkaniques. Pourtant, c’est par l’art cinématographique que Dracula devient un culte populaire, et ce, à l’échelle mondiale.

Le premier film mettant en scène les personnages du roman apparait en 1922: Nosferatu, Eine Symphonie des Grauens (Nosferatu, le vampire). Réalisé par le maitre du cinéma expressionniste allemand, Friedrich Wilhelm Murnau, et construit à partir d’un scénario d’Henrik Galeen et de Murnau, l’histoire est largement "inspirée" du roman de Stoker.


Nosferatu-Graf Orlok
Oeuvre de Gerard Torbitt


Omettant, faute de budget, d’acheter les droits du livre, Murnau et la société de production Prana film sont poursuivis par la veuve Florence Stoker, et reconnus coupables de plagiat en 1925. Les copies du film doivent être détruites. Mais une version fait surface en 1930 en Allemagne sous le titre Die Zwolfe Stunde (La douzième heure); une seule copie avait survécu au verdict de 1925.

Murnau cré une ambiance onirique et claustrophobique de cauchemar. L’œuvre lyrique, filmée en décor naturel en Allemagne et Tchécoslovaquie, inscrit des références dans l’histoire du cinéma. L’effroyable aspect du vampire; mains effilées, visage hideux, yeux cerclés de noir et dents carnassières. Sa démarche lente, raide, voutée rappelle la rigidité cadavérique et s’avère des plus inquiétante.

Le cinéaste accentue le sentiment d’angoisse en manipulant l’ombre du Nosferatu à dessein. La silhouette montant l’escalier menant à la chambre d’Ellen Harker est menaçante et démesurée; elle tend une main griffue vers la porte. Et cette main s’empare du cœur d’Ellen et la fait sienne.



Le film devient culte et, 57 ans plus tard, Werner Herzog rend hommage à Murnau avec son film Nosferatu, Phantom der Nacht (Nosferatu, Fantôme de la nuit). Klaus Kinski, acteur fétiche de Herzog, reprend le rôle du vampire tenu par Max Shreck en 1922. Isabelle Adjani y interprète Lucy (Helen) Harker. Herzog met en scène non seulement un prédateur, mais un être solitaire, tragiquement prisonnier de sa condition de Nosferatu. La scène de dialogue entre le vampire et Lucy est éloquente; la souffrance marque les traits du sinistre personnage.



D’autres éléments distinguent le film de l’original. Les techniques plus modernes (couleurs et parlant), le voyage à pied de Jonathan Harker dans les Carpates, l’enveloppante et inquiétante musique de Popol Vuh et la fin qui est nettement pessimiste.



Selon la mythologie traditionnelle, les vampires ne projettent aucune ombre. Mais Murnau évoque la présence de Satan dans le monde; l’ombre angoissante est celle du Malin et non celle de son pantin.

…l’ombre maléfique suffit ici à évoquer Satan, avec ses longues griffes, sa silhouette difforme, son nez crochu et un sourcil faisant penser à une corne.
(R.Muchembled, Diable! p.172)


Réf.:POZZUOLI, La bible de Dracula, Dictionnaire du vampire, Le pré aux clercs, 2010MUCHEMBLED, Diable!, Seuil Arte Éditions, 2002
http://www.iletaitunefoislecinema.com/
Remerciement particulier à Gerard Torbitt -http://robotatomico.deviantart.com/gallery/

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire